Transatlantique: 6 conseils d’un vieux loup de mer pour une traversée réussie

Se lancer dans une transatlantique est une aventure hors du commun, exigeant une préparation minutieuse et une bonne dose d’expérience. À Mindelo, sur les pontons du Cap-Vert, nous avons rencontré Michel dans le cadre du podcast The Other Side. Marin chevronné, il cumule plusieurs transats à son actif et a traversé des galères que peu de navigateurs aimeraient connaître. Entre anecdotes et leçons de mer, il nous a livré ses meilleurs conseils pour réussir une traversée de l’Atlantique en toute sécurité.

1. Choisir un bateau adapté et bien préparé

« La mer, c’est un milieu profondément hostile à l’homme. On peut y survivre, mais on n’y vit pas. »

Pour Michel, tout commence par un bateau en bon état et bien équipé. Il insiste sur la nécessité de connaître son bateau dans les moindres détails :

  • Un bon état général : il faut que la coque, le gréement et les voiles soient en excellent état. Une avarie au milieu de l’Atlantique peut rapidement devenir critique.

  • L’électricité et l’électronique : Michel a appris à ses dépens qu’un circuit mal vérifié peut provoquer un incendie. Il recommande de tout tester et de disposer de solutions de secours (batteries supplémentaires, panneaux solaires, etc.).

  • Un bon pilote automatique : il en a fait l’expérience, un pilote qui lâche en pleine traversée peut transformer la navigation en enfer.

Vérification des instruments de navigation avant le départ (Photo - Pierre-Emmanuel HUTEAU)

2. Gérer l’avitaillement avec rigueur

« Sur un bateau, il faut gérer la flotte et la nourriture. Il ne faut pas faire n’importe quoi. »

Sur une transat, l’avitaillement est crucial. Michel conseille d’avoir une organisation stricte :

  • Rationner intelligemment : il ne s’agit pas de se priver, mais d’éviter le gaspillage. À bord, on mange ce qui est préparé et on s’adapte aux ressources disponibles.

  • Prévoir des aliments de longue conservation : céréales, légumes secs, conserves… et ne pas tout stocker au même endroit pour éviter de tout perdre en cas de fuite.

  • L’eau, un bien précieux : elle doit être comptée et rationnée. Avoir un dessalinisateur est un plus, mais Michel recommande toujours de prévoir des réserves d’eau douce suffisantes.

  • Gérer l’alcool à bord: boire un verre pour célébrer un passage symbolique peut être tentant, mais Michel est catégorique : “En mer, on est responsable de sa sécurité et de celle des autres. Un équipage alcoolisé, c’est un équipage en danger.” La vigilance ne doit jamais faiblir.

Les produits frais font du bien au moral pendant les premiers jours de la traversée (Photo - Pierre-Emmanuel HUTEAU)

3. Tenir un rythme de navigation et organiser les quarts

« À trois, ce n’est pas gagné. Il suffit qu’il y en ait un qui se sente lésé et qui dise "c’est toujours moi qui…" »

La vie à bord repose sur une bonne organisation des quarts. Michel recommande :

  • Des quarts bien définis : même si la souplesse est possible, il est important d’établir un roulement clair.

  • Un bon esprit d’équipage : il faut savoir donner et recevoir, être à l’écoute des autres et éviter les conflits.

  • Une répartition équitable des tâches : notamment la cuisine et l’entretien du bateau, qui ne doivent pas reposer sur une seule personne.

Il y a des quarts plus agréables que d’autres ! (Photo - Pierre-Emmanuel HUTEAU)

4. Anticiper les problèmes techniques et s’adapter

« Si tu fais une connerie, tu la payes cash. »

Michel rappelle qu’en mer, chaque erreur peut avoir des conséquences graves. Ses conseils :

  • Vérifier régulièrement le matériel : une voile qui frotte trop au même endroit finira par se déchirer. Il faut constamment ajuster, réajuster et anticiper l’usure.

  • Savoir bricoler : être capable de réparer une avarie en pleine mer est indispensable. Un bon stock de pièces de rechange est essentiel.

  • Gérer les pannes de pilote automatique : un pilote en panne, c’est des heures de barre en plus. Avoir un plan B est impératif.

Un bateau bien rangé est un bateau en sécurité (Photo - Pierre-Emmanuel HUTEAU)

5. Profiter de la traversée et s’adapter au temps long

« Il va y avoir beaucoup de temps morts, mais on rentre dans un rythme. »

Une transatlantique, c’est aussi une aventure intérieure. Michel souligne l’importance de :

  • Se créer des occupations : pêche, lecture, observation des étoiles, navigation à l’estime… il faut savoir occuper ses journées.

  • Garder une discipline de vie : bien manger, bien dormir, s’hydrater et prendre soin de soi.

  • Profiter de la mer : malgré les difficultés, une transat reste une expérience unique qui pousse chacun à se redécouvrir.

De saines lectures pour Yohann (Photo - Pierre-Emmanuel HUTEAU)

6. Respecter la mer et naviguer avec humilité

« La mer, c’est brut. Elle ne pardonne rien. »

Michel conclut sur une note essentielle : le respect de l’océan. Il rappelle que :

  • L’anticipation est la clé : surveiller la météo, adapter sa route et ne jamais sous-estimer un changement de conditions.

  • La sécurité prime sur tout : le harnais et la ligne de vie ne sont pas une option, et il faut toujours avoir un plan de repli en cas de pépin.

  • Naviguer, c’est apprendre en permanence : même après des décennies d’expérience, il découvre encore des choses à chaque traversée.

L’océan peut parfois se révéler colérique (Photo - Pierre-Emmanuel HUTEAU)


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